vendredi 22 août 2014

"Je te souhaite de ne jamais avoir à pleurer pour d'autres raisons"

       Je suis de nature très émotive, et lorsque les émotions me submergent, que je n'arrive pas à la contenir alors je me mets à pleurer. C'est arrivé, il y a un an lorsque de multiples choses contrariantes se sont déroulées en même temps dans ma vie personnelle et je n'ai pas réussi à gérer et à prendre du recul. Ce jour là, mon manager, m'a dit cette phrase. Sur le moment, forcément j'étais très en colère. Ce n'est que ce dernier mois que j'ai compris cette phrase.

     J'étais en Israël, pendant la deuxième guerre du Liban en été 2006, j'étais alors une touriste qui venait faire un programme d'été à l'université de Jérusalem. Je me souviens que je lisais les journaux en anglais, les roquettes tombaient sur le nord du pays, les soldats tombés au combat. J'étais somme toute en vacances, et joyeuse de fêter le mariage de ma soeur (israélienne depuis longtemps déjà). J'étais loin de la réalité, je n'écoutais pas la radio en hébreu, ne lisais pas la presse en hébreu, j'allais rentrer en France quelques semaines plus tard, suivre de loin les évènements. Aujourd'hui, c'est différent. Je comprends tout (enfin presque).

     Je fais partie des privilégiés qui n'habitent pas dans le Sud ou à Tel-Aviv, qui n'avais pas de frère ou de père qui est parti au combat, qui ne vis pas à Gaza. Je ne fais qu'écouter les informations et me réfugier dans la cage d'escalier quand j'entends un sirène. Mais ô combien, j'aimerais que ce que je vis soit juste un cauchemard. J'entrevois aujourd'hui l'horreur de la guerre. Cette année, plus que toute les autres, la sirène du souvenir le jour de yom hazikaron, aura un sens encore plus fort. Car ils ont sacrifié leur vie pour moi. Car lorsque tout sera terminé, car oui, il y aura une fin à cette mission, toute chose a une fin. Lorsque nous reviendrons à une période de calme, que la routine reprendra le dessus, les familles des soldats morts au combat, des civils tués par les roquettes, les bléssés, eux seront meurtris toute leur vie. C'est cette pensée qui me poursuit depuis la mort du premier soldat. Une mère ne devrait pas avoir à enterrer ses enfants.

    Encore une fois, je ne rentrerais pas dans des considérations politiques, d'autres le font beaucoup mieux que moi. Ces mots peuvent paraître très naifs, et ils le sont, car j'ai eu la chance de vivre dans un pays en paix pendant 30 ans, qui voyait la guerre à la télévision, de loin, guerre pour moi virtuel. Mes soucis quotidiens paraissent aujourd'hui bien dérisoires.

vendredi 8 août 2014

14 Juillet 2014

Je recopie ici un texte que j'ai écrit le 14 juillet, soit environ une semaine après le début de la guerre. Car oui, on peut le dire maintenant, c'est une guerre. C'est un texte écrit encore avec sincérité, peut etre peu de recul, mais il reflète bien mon état d'esprit de ces jours là.
 
         Même si à Jérusalem nous sommes relativement épargnés, Israël vit en ce moment sous les bombes et dans la tension d'une éventuelle opération terrestre, avec tout ce que cela implique. Et je peux vous dire qu'avoir de l'empathie et du recul quand on vit au rythme des sirènes est particulièrement difficile. Maintenant l'exprimer implique une prise de conscience.
Il est facile d’être pris par l’émotion en comptant le nombre de mort dans chaque camp. Côté israéliens, aucune victime, malgré les centaines de roquettes qui tombent chaque jour, pourquoi ? grâce au dôme de fer, système israélien absolument génial qui explose chaque roquette en vol lorsqu'elle se dirige vers une zone habitée. Chaque tir coûte 60 000 dollars, mais la vie a-t-elle un prix ? Côté palestinien, 170 morts, combien de terroriste ? Je l'ai dit plus haut, vivre au coeur du conflit rend la prise de recul difficile et pourtant, je ne suis absolument pas insensible à ce que vivent en ce moment les civils gazaouis. Ils sont dans la pire des situations pris entre deux feux, entre les frappes israéliennes et le Hamas qui les tuerait si jamais ils s’indignent. Les terroristes du hamas eux sont allés se terrer dans les souterrains et bunker de Gaza et demandent à la population civil d'être des boucliers humains, des videos le prouvent...ils savent que Tsahal ne bombardera pas une maison de terroriste si des civils sont sur son toit. D’ailleurs avant tout bombardement de maison de terroriste, deux avertissements sont donnés. D’abord, Tsahal appelle les habitants pour leur dire de sortir dans les 5 min et ensuite une bombe assourdissante est lancée sur le toit. A part samedi soir, l’exception qui confirme la règle, le hamas, ne nous passe pas un coup de fil pour nous prévenir d’une attaque imminente. De manière assez froide et dénuée de tout humanisme pour quelques instants, continuons à faire parler les chiffres, 170 morts palestiniens, 70% de victimes civiles, 1 535 cibles terroristes attaquées par les raids aériens. Si comme le prétendent les pro-palestiniens de la manifestation d’hier à paris, Israël attaquait délibérément des civils, et non pas des sites terroristes (qui se cachent derrière des protections civiles), il faut croire qu’ils ont une efficacité très faible…
En passant, rappelons que l’électricité à Gaza est approvisionnée par Israël, le comble, Israël fournit de l’électricité à des terroristes (entre autres) qui le bombarbent…hier une roquette du hamas tombée en Israël a endommagé au passage une infrastructure électrique qui achemine de l’électricité à Gaza, 70 000 gazaouis privés d’electricité. La compagnie d’electricité, au regard de la situation et de la dette énorme d’électricité de Gaza, a décidé de ne pas se presser pour réparer les dommages...ça peut se comprendre…
Et si après tous ces décomptes effrayants, il y avait encore de l’espoir, malheureusement, plus le temps passe, plus cette étincelle s’affaiblit. Car à cette opération précisément, je ne vois pas de réponse. Cessez-le-feu, on laisse au hamas le temps de se réarmer et on remet ça dans un an et demi (après « plomb durci », 2008, « colonne de nuées », 2012, « Barrière protectrice » 2014, « … » , 2016), reconquérir Gaza ? pour quoi faire ?
Comme je l’écrivais il y a peu de temps à une amie, à la suite des quatre terribles assassinats d’adolescents, j’ai l’horrible sensation que nous sommes englués dans un jeu morbide et sans fin.