vendredi 23 octobre 2015

Journal - 22 octobre 2015

          Bilan de la journée, une attaque au couteau ce matin à Beth Shemesh qui a fait un blessé léger mais qui aurait pu être beaucoup plus grave, deux terroristes ayant heureusement sans succès tenté de rentrer dans un synagogue. On a aussi appris que le terroriste du dernier attentat d'hier était en réalité un juif de Jérusalem, il s'est passé quelque chose d'assez bizarre selon les premiers éléments de l'enquête notamment qu'il avait tenté de s'emparer de l'arme d'un des soldats de garde, ils ont alors tiré sur lui.

          Ce n'est pas la première erreur dramatique des forces de sécurité cette semaine...Dimanche soir lors de l'attentat de Beer-Sheva, au cours duquel le soldat Omri Levi, a été tué, les forces de sécurité ont tiré par erreur sur Habtom Zarhom, demandeur d'asile érythréen. Lundi, j'écrivais à une amie mon émotion et mes questionnements.
"Notre société elle-même est tristement malade, la question de savoir s'il faut ou non tuer le terroriste me tourmente, et la multiplication du port d'arme, les citoyens qui font justice eux mêmes, tout cela a amené à un drame lors de l'attentat d'hier, drame, si un attentat en lui même c'est pas déjà un drame. Un terroriste a réussi à tirer sur un soldat, l'a tué puis, s'est emparé de son arme et a tiré sur d'autres soldats, lorsque la police est arrivée elle a cru qu'il y avait deux terroristes et a tiré sur un erythréen par erreur. A terre, les gens autour se sont acharnés sur lui, et l'ont véritablement lynché, croyant que c'était un terroriste (mais même si il avait été terroriste ???), quand la police c'est rendu de son erreur c'était trop tard, ses blessures étaient tellement grave qu'il est mort dans la nuit." L'enquête s'est poursuivie depuis dimanche, ceux qui ont participé au lynchage ont été arrêté, le rapport de l'autopsie affirme que la mort de Habtom Zarhom était la conséquence des tirs. Sans commentaire...
Quelques jours plus tôt, j'avais lu cet article qui éclairait quelque peu les choses : http://fr.timesofisrael.com/comment-le-jugement-dune-menace-est-interprete-par-les-policiers-et-les-internautes/
Et maintenant je rapporte une voix différente, celle qui dit qu'il faut tuer le terroriste, le tuer car il est ensuite soigné et vis en prison à nos frais, (argument moyen je trouve à vrai dire, d'autres criminels aussi sont en prison à nos frais). L'autre argument est certainement plus problématique, il n'est pas rare que des terroristes soient libérés au cours d'un accord d'échange, le dernier en date, c'est l'échange contre le soldat Guilad Shalit, des terroristes ont été libérés et n'ont pas attendus longtemps avant de participer à de nouveaux attentats...Et puis, un terroriste ne te demande pas si tu es de droite ou de gauche avant de lever son arme sur toi, il ne te demande pas si tu es monté sur le mont du temple, si tu es raciste ou humaniste, non, il tue et veut tuer le plus de personnes possible et est prêt à mourir pour cela.
 
Avec tout ces évènement en tête, je pars vers mon atelier ce matin, à pieds comme à mon habitude. Sur la route, une camionnette s'arrête à ma hauteur et deux hommes, qui de faciès et d'accent avaient l'air arabe, m'ont demandé une indication de chemin, et alors que je commençais à saisir leur demande et répondre à leur question, la peur s'est emparée de moi. Si jamais ils étaient terroristes ? Si jamais ils ne me demandaient leur chemin que pour détourner l'attention et qu'ils vont sortir une arme et tirer ? Car cela est déjà arrivé, l'été dernier à Gaza, un soldat à qui un arabe a demandé de l'aide a été piégé et a été tué par une bombe.

Malgré tout cela, je dois me raisonner, reprendre le bus et aller me changer les idées. Il y avait ce soir une soirée organisée par "Pashout sharim" ce qui veut dire, "Simplement chanter". J'avais déjà été il y a quelques années à ce genre d'évènement, juifs et arabes, chantent ensemble des chansons israéliennes, des chansons arabes et les interventions sont dites dans les deux langues. C'était très beau. Ce soir, c'était assez restreint du côté arabe, effectivement ambitieux pour eux de faire la queue aux check-points qui ferment leur quartier, mais quand les terroristes viennent de ces mêmes quartiers, que faire ? Malgré tout, la soirée était très belle, on voit que la rentrée étudiante est passée, l'espace était rempli de jeunes qui dès la première note de musique se sont levés pour danser. Il y a eu aussi un temps des anti-co-existence entre juifs et arabes qui ont crié contre, mais le public a décidé de crier plus fort qu'eux des encouragements aux artistes sur scènes et ont étouffé leur slogans. Finalement, ils sont partis assez rapidement. 

J'ai dansé moi aussi, je me suis rarement autant laissé entraînée par la musique, un peu euphorique, j'avais réussi à braver mes peurs pour un soir. 
Et en dansant cette danse de liberté, je pensais aussi aux morts, à ceux de cette semaine, de la semaine d'avant et ceux d'il y a quelques mois, aux blessés dans les hôpitaux et plus j'y pensais plus je sautais et me laissais portée par la danse et la musique. 
J'étais debout et c'était mon hommage à la vie.

mercredi 21 octobre 2015

Journal - 21 octobre 2015

Depuis plusieurs semaines maintenant la vague d'attentat, la troisième intifada a commencé. J'ai ainsi longtemps gardé pour moi tout ce que je vivais, entendais, lisais mais comme finalement j'ai beaucoup de choses à dire, j'ai décidé de les écrire. Déjà sur les semaines passées et sur ce début de semaine en particulier j'ai beaucoup de choses à dire mais je ne veux pas revenir en arrière, peut être que cela transparaîtra dans les prochains billets. Les textes sont écrits donc sur le vif.

Le 21 octobre 2015 se termine dans quinze minute et il y a eu 5 attentats aujourd'hui, le dernier il y a quelques minutes, attentat à la voiture bélier, attentat à l'arme blanche, jets de pierre puis voiture bélier, plusieurs blessés dans un état grave aujourd'hui, d'autres blessés moyens ou légers. Les terroristes ont été tués ou blessés au cours de l'attentat. Une roquette tirée depuis Gaza qui a attérit  à moins d'un kilomètre de la frontière sans faire de blessés. C'est devenu notre quotidien ici, on en devient moins émotionnellement touché, car il faut que la vie continue aussi.

Ce matin, je me suis réveillée indignée par les propos débiles de Netanyahou qui a dit qu'Hitler n'avait pas l'intention d'exterminer les juifs mais que cela lui avait été soufflé par le mufti de Jérusalem. Même s'il s'est rendu compte de sa connerie et est revenu sur ses propos dans la journée, le mal est fait. C'est là que je lis une réflexion sur Facebook, disant que tout d'un coup, certains personnes dans nos contact s'empressent de relayer cette grosse boulette de Bibi, tiens le moyen-orient les intéresse toujours dit-il, pourtant on n'a pas lu d'autres réactions pendant trois semaines, lors d'attentats meurtriers et aveugles, lors d'émeutes ? Etrange non ?

Aujourd'hui, j'ai parlé avec quelqu'un qui m'a dit de ne pas changer mes habitudes, de continuer à faire les courses au shouk, de continuer à sortir et de ne pas avoir peur parce qu'il y a des policiers et militaires partout. Jusqu'à présent j'avais décider de sortir très peu, juste le nécessaire et l'indispensable. Ce week-end, je dois aller à Tel-Aviv, prendre le bus, aller à a la gare central, ce ne sera pas des moments facile, mais c'est décider, j'irai à Tel-Aviv.

Aujourd'hui j'ai lu ce texte sur Facebook, que je traduis de l'hébreu, lui même traduit de l'arabe, c'est un groupe d'israéliens qui a décidé de traduire des statuts de pages populaires de Jérusalem-Est.
עמוד 'בית חנינא-ירושלים':
"אחרי השהיד émoticône frown משהו חסר בכל מקום. ספה שתישאר ריקה זמן רב. כיסא פחות בשולחן ארוחת הערב. מושב ריק במכונית. קול מת בבית. ערוץ בטלוויזיה שכבר לא יהיה פתוח. מיטה שאף אחד כבר לא יישן עליה. ספרים ומחברות שיישארו סגורים. בגדים שאף אחד לא ילבש. אחרי השהיד נוצר חלל גדול ששום דבר אף פעם לא ימלא. גם אם מיליון אנשים ינסו להשלים את החסר, החלל ישאר כמו שהוא.
אבל למרות כל זה, המולדת ראויה שנקריב בשבילה ואל-אקצא ראוי לעוד ועוד מרוחנו ונשמתנו, מילדינו ואחינו."
 Page "Beit Hanina - Jérusalem"
Après la mort d'un mort d'un martyre, quelque chose manque dans chaque endroit. Un canapé qui restera vide pendant longtemps, une chaise en moins à la table du repas du soir, un siège vide dans la voiture. Une voix morte dans la maison. La télévision qui ne sera plus allumée. Un lit sur lequel personne n'ira plus dormir. Des livres et des cahiers qui resteront fermés. Des habits que plus personne ne mettra. Après un martyre, il reste un grand vide que jamais rien ne pourra remplir. Même si des millions de personnes essaient de compléter ce qu'il manque, le vide restera vide. Mais, en dépit de tout cela, la patrie vaut qu'on se sacrifie pour elle et Al-Aqsa vaut, encore et encore, de nos esprit et nos âmes de nos enfants et de nos frères.
Voilà comme si on ne le savait pas déjà, la perte d'un être cher est aussi douloureuse pour les israéliens que pour les palestiniens, que les israéliens sont aussi prêts à se sacrifier pour protéger leur pays. La différence étant que nous ne pensons pas que nos morts sont des martyrs, et nous n'entraînons pas nos enfants à devenir des martyrs, ce ne sont pas des terroristes dont le seul but dans la vie c'est de tuer des juifs. La vie est dans le judaïsme plus forte et plus importante que la mort, "tu choisiras la vie" dit la Bible.

Aujourd'hui, j'ai entendu parlé à la radio le Rav Cherki qui disait que lorsqu'il y a des attentats, il faut s'entraîner au krav maga et au self defense et renforcer notre souveraineté, mais qu'étudier la Torah n'était pas la réponse adéquat en cas d'attentat. Bon pour moi, ça coule sous le sens, mais pour des personnes ayant la foi c'est assez révolutionnaire.  

Aujourd'hui, j'ai avancé et reculé aussi dans mon travail personnel, mon métier demande beaucoup de patience, mais des fois, c'est dur de résister, et d'attendre, alors, je brûle les étapes et finalement, ça détruit mon travail. Mais voilà, on apprend tous les jours.